MERCI MAMADOU
Le samedi, à Uzès il y a un grand grand marché. Et sur ce marché il y a un vendeur merveilleux, que tout le monde aime, et qui s'appelle Mamadou. Mamadou est d'origine sénégalaise, il est très grand, très costaud, il me fait penser à Ousmane Saw question carrure, c'est dire, et il vend des chaussures.
Moi, j'ai beaucoup de chance parce que c'est juste là, sous mes fenêtres qu'il installe sa boutique ambulante.
Alors le samedi, quand il fait froid, je lui apporte le thé. ça me fait plaisir de préparer le thé à la menthe comme là bas, et de livrer sur le trottoir le plateau fumant. Parfois mes enfants l'aident à remballer, quand il est seul et qu'il nous semble qu'il est bien tard, et qu'il y a encore beaucoup de cartons qui n'ont pas réintégré le camion.
Quand je lui propose le thé, Mamadou répond toujours; tu ne dois pas te fatiguer pour moi. Et après; merci, mais tu n'aurais pas du te donner cette fatigue.
Le soir, quand il remballe je lui demande comment ça a marché, et il répond toujours ; bah on bircolle. Ce n'est pas une faute de frappe, il dit vraiment on bircolle ou on a bircollé. Et moi je me régale, j'adore quand il dit ça. Je ne sais pas pourquoi c'est une faute de prononciation que j'ai souvent entendu dans des bouches africaines.
Donc, surement à cause du thé et tout ça, Mamadou me fait parfois des petits cadeaux. Quand j'ai acheté des chaussures pour les enfants je n'ai pas réussi à les payer, pareil pour mes tongs, l'été. Donc un jour, c'était l'automne et en automne Mamadou vend des chaussons. De gros chaussons en laine, pour la campagne. Alors un jour il en prend une paire et me dit tiens prends pour toi des chaussons, et pour les enfants aussi, c'est quoi leur pointures.
Non, Mamadou, c'est gentil mais ils ne portent pas ça et moi non plus, je n'en mets pas des chaussons.
Si tu les prends, voilà.
Bon, je pars avec les chaussons et je les oublie dans un fond de placard, vu que je n'en mets jamais. Mais un jour j'avais froid aux pieds parce qu'il y a du carrelage partout dans ma maison. J'ai enfilé les chaussons, et c'était délicieux. Et depuis je mets les chaussons de Mamadou, il faut dire que je suis célibataire en ce moment. C'est plus facile pour le conford...Je mets tous les jours ces chaussons et chaque fois je lui dis Merci Mamadou, et pas que pour ça.